Pierre-Henry Coûteaux, instituteur pensionné, marié, père de trois filles et papy de sept petits enfants, est passionné depuis toujours par la photo, la lecture, les randonnées et l’écriture. C’est avec ses yeux de photographe et de randonneur qu’il rédige les quelques nouvelles qui caractérisent son profil d’écrivain amateur : « Colère en montagne », « Les volets bleu », « les ronds dans l’eau », « Assuétudes » , « Time’s up ! », « ensablement », « le grand flamboiement du couchant ».
Pierre-Henry Coûteaux est pensionné actif dans l’ASBL Couples et familles en tant que rédacteur occasionnel, administrateur et membre du comité de rédaction. Il est également éditeur responsable de la revue éditée par Couples et familles.
Chronique des erres, rêves d’errance
J’ouvre aujourd’hui la chronique Désert !
J’ouvre aujourd’hui la chronique « désert » ! Le désert ? Des aires immenses, des airs limpides, des erres qui foulent le sable ! Errer, voilà un mot bien éloigné des préoccupations quotidiennes de la vie trépidante et efficiente de notre société occidentale. Errer dans le seul but d’avancer dans l’infini, de fouler des aires séculaires, de marcher au rythme lent des caravanes dans la quête de l’infinitude ! Errer pour enrayer l’assuétude du faire qui conduit à l’activisme. Errer pour retrouver les pulsations de l’univers ! Errer pour ne rien faire sinon marcher un pas après l’autre, sur les pas des autres, sur les pas de l’Autre !
Assuétude(s) ! Le mot est lancé ! J’ose croire que les grands espaces du désert, le silence du monde moderne, les cieux infinis et la marche casseront les assuétudes personnelles. Errance purificatrice, marche méditative, contemplation de la voûte céleste. Défaire le faire pour un temps ! Déserter un moment le plein pour le vide. Echapper à la dépendance du faire qui me pousse au milieu du torrent fou de la vie ! Un moment d’ensablement !
À l’origine, le verbe errer signifie tout simplement aller, à l’image du chevalier errant.

Grâce à cette chronique je peux m’offrir un texte « rev’errance ».
Rêve en gestation, rêve en errance à quelques jours du désert. Errance de l’esprit vers des horizons lointains, vers des cieux infinis. Errance des pas dans le sable. Révérence à tous ceux qui ont contribué à ce que ce rêve d’errance se concrétise. Révérence à la lumière, révérence à la simplicité… au rythme quotidien de la marche qui se profile déjà. Mon imagination marche déjà au rythme des méharées. Rev’errance à l’immensité. Ce qui me plaît aussi dans ce rêve qui est en passe de se réaliser, c’est la co-errance qui nous attend. Ensemble, mettre nos pas dans nos pas. Mon imaginaire de Rev’errance a soif de co-errance et de cohérence.
Errance. Errer. Quelles images ces termes évoquent-ils ? Des chevaliers médiévaux en quête d’aventures, des tribus errantes, des nomades, des vagabonds en mouvement constant ? Ou peut-être évoquent-ils des flâneurs déambulant sans but parmi des rues familières ? Parmi les campagnes ? Ou dans nos bois et forêts ?

Dernière semaine avant le départ dans le désert
Lundi 22/10 : Dernière semaine avant le départ ! Temps et tant attendu depuis deux ans ! Dans mon tram quotidien, la nuit est profonde et les premiers froids sont bien là ! J’essaie d’imaginer ce désert au loin qui me nargue, ce sable chaud des jours plombés par le soleil, ces sables rafraîchis après l’embrasement du soleil couchant ! J’imagine ce sable fin couler entre mes doigts, poussière fine fruit du travail patient du temps et du vent ! Des siècles d’érosion et de sécheresse qui ont eu raison de la végétation ! Pourtant la vie est bien là, des hommes y passent pour un temps, d’autres pour une vie. Certains y meurent.
De tous temps des caravanes l’ont traversé, l’ont parcouru fascinées, dans la crainte et dans le respect ! Des lieux où des hommes se sont perdus mais ou d’autres se sont trouvés dans ce silence minéral ! Au milieu de nulle part ou de partout, dans ces immensités de sables et de rocs brûlées par le soleil, gelées par les grands froids des nuits, certains voyageurs ont trouvé Dieu comme un oasis dans les sables stériles. Les Pères du désert ont vécu des expériences mystiques seulement possibles dans des lieux tels que celui-ci ! De mon tram qui touche à son terme, c’est difficile à se l’imaginer !
Mardi 23/10 : Jour J -5 ! L’impatience monte. Comme je me trouve loin de la source pour le moment ! Mes réflexions ne sont pas centrées sur elle ces derniers jours. Mon esprit voyage plutôt vers l’écriture, vers la préparation mentale, matérielle et physique au désert. Pourtant un de mes buts dans cette expérience particulière est de rechercher les pas de Dieu dans le sable ou des traces de Lui dans le firmament céleste. J’espère que les espaces immenses, que la marche et le silence me permettront, en communion avec mes compagnons d’errance, de remonter dans la mémoire collective humaine pour réactiver des souvenirs cachés de notre hérédité divine.

Je voudrais remonter dans la petite enfance de l’humanité afin de renouer certains liens défaits par l’amnésie collective humaine. Cette source de toute vie, ce point d’origine vers tout semble converger, c’est en moi que je peux la retrouver et y réveiller des souvenirs. Le désert ancestral a connu bien des temps. De par sa longévité, il fait partie des temps oubliés, de ces périodes effacées ! Le désert peut donc aider l’homme à soigner son amnésie. C’est un de mes buts en m’y rendant !
Samedi 27/10 : Plus de deux ans d’attente, d’espoirs, de projets, ont peuplé notre imaginaire et convergent en cette fin de nuit à Zaventem. Nous venons de décoller avec Jamy, l’ami du vent et notre nouveau compagnon de voyage. L’avion vient de décoller qui nous délivre de nos impatiences. On ose y croire. Le désert est maintenant notre futur proche. L’aventure vient de débuter, tout le monde est au départ joyeux et confiant. Le désert immense est encore un point minuscule sur la carte aussi petit qu’un homme perdu dans un océan de dunes.

Partout à perte de vue le désert…
Du lundi 29/10 au vendredi 02/11 : Ce petit grain de sable minuscule sur la carte de nos rêves est devenu immense. Partout à perte de vue le désert nous écrase, nous force à revoir les frontières de nos représentations habituelles.
Avant-hier, l’atterrissage et l’île de Djerba vite oubliés, une descente en 4X4 à travers des terres inconnues, rustiques et innovantes nous a conduits, en quelques heures non loin de Douz, village berbère aux portes du désert. Un autre monde, une autre réalité qui déjà, dans notre périple vers l’inconnu secoue, remet en question, nous fait entrevoir d’autres réalités. Les horizons s’élargissent au propre et au figuré.
L’accueil est chaleureux, simple, sans faux fuyant ni faux semblant comme les conditions de vie d’un autre temps. Le changement est impressionnant, brutal. Dans ces conditions, écrire est difficile et le temps manque dans cette journée de transition. Le lendemain, nous nous enfoncerons dans ce désert qui déjà nous envoûte et nous laisse entrevoir ses aires spacieuses et inquiétantes. D’abord en jeep et puis enfin à pied.
Hier, premier contact avec ce que nous croyions être le désert sur ces pistes à peine tracées dans ces terres ensablées et faiblement plantées de chétifs buissons. Secoués par les 4X4 avalant les km ensablés et jouant à saute-mouton avec l’ondulation des monticules de sable, nous retenions notre enthousiasme à fleur d’épanchement à peine retenu par l’état de la route.
Déjà, une sorte de passage « de l’autre côté » s’entrouvrait. Déjà plus rien n’était en rapport avec ce que l’on connaissait. Mais tout cela n’était encore rien par rapport à notre première expérience avec le vrai désert et ce contact neuf avec ce sable nu, fin, aérien, d’une couleur insoupçonnée et encore peu familière. Le vent aussi était déjà là sans retenue, fidèle eu poste et le ciel d’un gris inattendu vint renforcer l’impression sauvage, inaccueillante et angoissante.
Heureusement l’accueil des chameliers qui nous attendaient au seuil du grand désert et de la tente bédouine fut chaleureux, la galette cuite sous la braise, un enchantement et l’ombre salutaire de la tente un refuge contre le soleil pourtant souvent voilé. La première marche d’hier après-midi nous écrasa au sol par la lourdeur humide inhabituelle de l’atmosphère. Dans le désert l’air est généralement asséché par le soleil et le vent qui règnent sans partage sur ces territoires sans fin. Longue marche de trois heures qui nous conduit vers un point de non-retour, le premier bivouac !

Après une première nuit à la belle étoile et trois heures de marche matinale, à travers les dunes, nous voici dans une pleine mi-caillouteuse, mi-sableuse parsemés çà et là de quelques épineux rabougris. Les corps fatigués se reposent sur des lits de fortune avec les mouches comme compagnons. Pour le moment, le manque de soleil nous protège heureusement des fortes chaleurs et de ses rayons cuisants mais la belle lumière fait défaut.
Le pain, lui, cuit dans la braise. Tout cela, sous le souffle du vent qui expectore du sable. Les chameliers vaquent à leurs occupations domestiques. Quelques branches mortes, quelques racines orphelines alimentent les feux sur lesquels cuisent les aliments. Un feu pour le pot au feu et le thé… un feu pour la galette de pain plate et croustillante.
Horizons infinis brisés de-ci delà de cordons de dunes lointaines et inquiétantes. Les Berbères sont dans leur élément dans cet univers rude. Les vents desséchants, le sable abrasif, le soleil brillant figent ce coin de planète en instant d’éternité. Tout est démesure. Les hommes tout petits dans cette infinité géographique et temporelle retournent peu à peu au silence premier. Petit à petit un certain dénuement s’insinue dans les consciences… un chemin vers l’essentiel ouvre une brèche dans les barrières de dunes de nos besoins artificiels. Les besoins premiers remontent à la surface tels des petits cailloux désensablés par le vent du désert.
Le chèche nous protège du vent, du soleil et du sable. Ces chèches dont nous découvrons au fur et à mesure de notre progression errante, les utilités nombreuses dont celle de nous isoler. La tête enrubannée, il nous sert d’isoloir au monde qui nous entoure et nous aide dans la méditation rythmée par la marche lente.
Le temps de l’essentiel est revenu, comme l’eau au désert. Le silence pénètre tout et aide au retour sur soi. L’ensablement s’opère. Ce silence, rythmé par la marche méditative et le chant du vent, est parfois dérangé par les invectives des chameliers qui s’interpellent dans leur langue gutturale. Silence qu’accompagnent aussi les bourdonnements des multitudes de mouches qui vrombissent en tous sens dans une frénésie hyperkinétique et auxquelles il est difficile de s’habituer au contraire du sable. Mais que le désert est beau et varié au-delà de ses contrariétés !

Deux nuits ont passé dans le désert immense dont la première arrosée de quelques averses qui ont perturbé humoristiquement notre première partie de nuit. Le désert est rude mais aussi taquin. Les marches et les tâches quotidiennes prennent presque tout notre temps. Le peu qui nous reste sert au deux méditations zazen quotidiennes, aux repos ainsi qu’aux soirées autour du feu à partager le repas commun et l’amitié avec nos chameliers attentionnés et chaleureux.
Le désert est si différent de l’image qu’on en fait…
Le désert est si différent de l’image qu’on en fait à partir de photos figées aussi artistiques soient-elles.
Le désert change d’aspect, de relief, d’horizon et de couleurs à tout moment, même au rythme lent d’une caravane. Faut-il donc dire qu’il est varié et changeant. À tout moment, il nous réserve des surprises.
Entrelacs de petites dunes éphémères et labyrinthiques nous barrant le chemin et obligeant notre caravane à louvoyer au gré de leur ondulation et leur orientation, dans des direction changeantes et mal définies ; cordons de dunes hautes aux lignes courbes et pures et au crêtes fragiles, allant en s’élevant, et de prime à bord infranchissables mais que l’on franchit malgré tout avec patience sur le fil des crêtes ; vastes plateaux caillouteux battus par des vents éternels et balayés par les sables errant ; cirques étrangement lunaires enceints de hautes dunes jaunes ocres ; steppes pierreuses aux herbacées basses et chétives.

Jeudi, la nuit bleutée au ciel infini et étoilé laisse la place à l’aurore fauve. La lune brille encore de tous ses feux, mais très vite l’horizon d’abord laiteux, s’embrase dans l’air glacial. Le soleil impérial entame son ascension et allume les dunes d’un jaune orangé. Jeu d’ombre et de lumière, jeu de contrastes saisissants que les rayons rasants de l’astre du jour dispensent. Le yin et le yang. La caravane s’éveille à la vie, les tâches matinales quotidiennes chassent les dernières torpeurs de la nuit durant la méditation. Le départ est proche vers une journée de marche à la fois similaire à la fois différente, à travers dunes, plaines et steppes.
« Les vagues
En lame
Des dunes
Ont
Le vague
À l’âme
Houle
Que foulent
Mes pas
Dans
Tes pas ».
Et la caravane chemine, comme cheminent nos pensées. Et la caravane marche au fil ténu des traces, de dune en dune, de crête en crête. Se font infinis les sables et les cailloux qui sont là sans doute, immuables, depuis la nuit des temps, dans le même silence seulement rompu par le souffle tenace du vent et dans le même éblouissement de lumière. Nuit des temps, nuit de nos origines oubliées dont le désert a peut-être gardé traces ?
Cheminer, cheminer sur les sentiers de l’errance, déambuler dans les sables brûlants, virevolter tel un bateau ivre encore et toujours de par les vallées dunaires et les dunes qui se succèdent encore et encore, s’entrecroisent, se congèrent à l’infini. Elles apaisent l’âme, les dunes, dont la houle berce le voyageur de passage. De temps en temps, leur ballet s’interrompt et elles s’écartent pour laisser des semis de petites pierres grises ou noires, souvent cendrées.
Dans ce monde rude et minéral seul le silence survit
Dans ce monde rude et minéral seul le silence survit. Les paroles sont éphémères et les bruits passent. Même le chant du vent s’épuise finalement dans l’infinitude de ces espaces oubliés. Au désert le silence est vertu cardinale et les voix s’éteignent naturellement. C’est dans le silence des mots et la contemplation, qu’au tréfonds de notre être et par-delà notre errance peut jaillir la vie intérieure.
Le désert peut-il tolérer les êtres qui n’ont aucune vie intérieure ? Sans doute la question est-elle mal posée ! La solitude exige d’être meublée et le voyageur ne manquera pas d’y rencontrer la source originelle de toute chose en laquelle puiser l’énergie vitale. Car la marche purge le corps et le silence pénètre l’esprit par tous les pores comme mille grains de sable. Au désert nul ne peut se dépêtrer du sable. Du silence non plus et le silence est la première chanson de l’âme.

Et puis la caravane s’arrête à nouveau lorsque les heures du jour s’épuisent, en un point quelconque de la solitude infinie. Chacun trouve qui sa dune, qui son creux de sable fin protégé par un arbuste ou une haute plante ligneuse aux longues feuilles effilées. Et, très vite, après les paquetages défaits et les matelas installés, les prémices de la nuit se manifestent.
Le jour chute bien que les collines dunaires à l’horizon restent embrasées longtemps après l’incendie du soleil couchant. Ce soleil, que le voyageur honnit parfois dans son errance brûlante, se rendra vite désirable quand le froid glacial de la nuit aura pris possession des corps fatigués et meurtris. Heureusement, avant que l’horizon n’ait cessé de rougeoyer, quelques branches sèches judicieusement disposées par les chameliers auront vite fait d’allumer ce coin de nuit, refuge désuet de nos fatigues et point de convergence de nos reliances.
Vendredi matin, aube de la fin de notre co-errance, emmitouflés dans notre nuit résiduelle, engoncés dans nos polaires, le froid nous fige au fond de nos sacs de couchage ou, au contraire, nous force à réagir et à activer le sang neuf du jour naissant. Comme chaque matin, s’éveiller au jour, en un point différent de ce vaste désert, s’étirer dans la splendeur du matin vierge, à l’heure où l’espace bleuté qui nous environne s’irise en son bord, d’une fine encolure dorée. Sur le sable encore froid, enrouler son turban et s’habiller pour le jour neuf, se draper pour le soleil, le vent, le sable.
La caravane s’éveille, s’ébranle, s’active. Le chant cuisant de l’eau sur l’âtre humanise le paysage sauvage qui s’allume à l’arrivée de l’astre. La galette cuit sous la braise. Bientôt la caravane s’ébranlera avec ses marcheurs opiniâtres et ses neufs dromadaires encapuchonnés de bric et de broc.

À nouveau la marche…
À nouveau la marche dans la succession des paysages variés, désolés, sauvages, abandonnés, fouettés par la rigueur du temps. Une fois encore cheminer, cheminer. Se mettre à nouveau en chemin sur l’errance du fil fragile des dunes dans l’ivresse des grands horizons. Cheminer en rêvant, les pas sur les pas des autres, derrière les longues jambes de sauterelles du dromadaire compagnon grognon de nos routes, le nez sur la croupe qui tangue lascivement au rythme du convoi. Le cheminement chaloupé de ces grandes bêtes au balancement éternel qui ne savent pas où poser leur large pied disgracieux nous accompagne dans nos propres cheminements incertains.
Pour la dernière fois nous traversons des plaines vastes et infinies, sans borne visible, toute de pierrailles, de caillasses et de sable, tachetées de chétifs arbustes verts tendres ou gris cendré à demi morts, maigres pâtures pour les bêtes de somme et les montures du désert. Quelques grands troupeaux de chamelles brouteuses croisent notre errance et les cris des chameliers amis qui s’interpellent nous réveillent de notre torpeur que le plomb du soleil occasionne.
Et puis, c’est un vaste plateau cuisant, tacheté de verts plus nombreux, empierrés par endroit, sur le socle même en d’autres, enveloppés en maints endroits d’une fine couverture de sable d’or ridé et dont l’horizon n’offre aucune élévation à 360°. Un espace plat dans un cercle parfait. Pourtant, à force d’avancer droit devant, une ligne de fracture nous offre soudainement, en contrebas, une vaste plaine semi désertique au cœur de laquelle la tache verte foncée et dense, incongrue, d’une oasis s’offre à notre vue étonnée. Entre elle et nous, au début de ces basses terres inattendues, une dernière barre dunaire reste à vaincre, bordée de pâturages à peine plus riches que l’accoutumée où paissent chèvres noires et moutons blancs.
Dernières hautes dunes donc que nous franchissons allègrement après la halte méridienne mais avec un plaisir particulier saupoudré de nostalgie. Du haut de la plus haute nous regardons en arrière le chemin parcouru et savourons une dernière fois ce sable chaud d’un jaune ocre qui se modèle et se sculpte avec tant de finesse sous l’action éolienne.
Une fois cette ultime dune franchie, l’oasis s’offre à nous. Plus que quelques minutes d’approche au travers d’une steppe plus riche en graminées, minutes qui nous paraissent une éternité, et notre caravane fait sa dernière halte. Une dernière fois nos bagages, les sacs de jute, les bidons, les matelas, tout est par terre, éparpillé sur le sable. Une dernière fois les dromadaires errent aux alentours et les Berbères sont là groupés dans l’attente africaine. Ce lieu marque la fin de notre co-errance. Le début des terres habitées n’est pas loin et la civilisation nous rattrape d’un coup par le survol soudain et bruyant de deux chasseurs.

Les dons de notre désert
Ce brutal rappel à la réalité ne nous reprendra cependant pas les dons de notre désert à savoir le vent, le sable et le soleil qui nous ont façonnés et personnalisés autant que ces déserts immenses et antédiluviens. Ces trois éléments, compagnons permanents de notre semaine de nomadisme, nous ont également marqués de leur empreinte, chacun dans ses spécificités.
D’abord le vent qui nous a poussés dans les plaines arides, giflés dans les steppes grises, rafraîchis sous le feu du soleil, transis dans les ombres profondes de la nuit. C’est aussi lui qui nous a transmis le souffle cosmique, ouvert le ciel sidéral et offert le spectacle de lumière de nos nuits étoilées.
Ensuite le sable dont chaque grain rencontré nous a habités jusqu’au moindre recoin du corps. Ce sable fin, roux orangé, soyeux aux propriétés purificatrices certaines, a permis de nous laver quelque peu de nos assuétudes.
Enfin l’astre flamboyant du jour qui nous a réchauffés le cœur et le corps lors des aurores glacées, dont la présence nous brûlait par moment, rendant plus humble les pèlerins du désert, fut pour nous et tous les hôtes du désert symbole de permanence, dans l’impermanence des paysages, des chemins et des hommes. Soleil, foyer de notre galaxie, feu de notre intériorité, chaleur de nos liens, énergie vitale dont le flamboiement orangé ou pourpre, les rougeoiements impérieux, les flashes aveuglants coloraient le firmament de son brasier. Ce soleil adoré ou redouté depuis la nuit des temps fut, durant ces quelques jours d’errance le berger de notre transhumance.
Soleil, sable et vent resteront longtemps compagnons de voyage après notre retour dans nos contrées habitées.
Pierre-Henry Coûteaux
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